Pages

Mes p'tites souris, mes p’tits lapins,

Je m'appelle Balie. Je suis apparue le 19 aout 2009 dans les entrailles de la Matrice de SHOT ONLINE et de la volonté de mon Ange Gardien, avec pour unique but: prendre du plaisir à jouer au golf avec des partenaires multiples.
Ce joli blog ne se veut qu'un reflet des bons et mauvais moments passés dans le Joli monde de SHOT ONLINE (S.O : SOland), une fenêtre ouverte, aussi, sur les rencontres parfois ennuyeuses, souvent jubilatoires avec les autres jolis êtres issus également du ventre de S.O.
Les premières heures passées avec les Essoliens et Essolliennes (habitants de SOland) ont mis en évidence des similitudes avec votre monde du dehors... Ce joli monde, propre, bien rangé, où tout est beau et harmonieux n'en cache pas moins, derrière ses apparences, des injustices, des inégalités, des travers qui se doivent d'être dénoncés!
Les dénoncer non seulement pour tenter de les combattre de ce coté-ci de l'écran, mais aussi parce qu'obtenir des avancées sur la condition des filles, sur la préservation de l'environnement, le pouvoir d'achat et les conditions de travail à SOland (pour ne citer que ceux-là) aura forcément un impact sur ces mêmes sujets dans votre grand monde du dehors!
Puis, raconter les belles rencontres que je fais chaque jour autour du square, dans le sable ou au bord du green rendra peut être certains d'entre vous finalement un peu plus optimiste sur la nature Essolienne comme sur la nature Humaine. C'est le moins que je puisse souhaiter à mes p'tites souris et mes p'tits lapins...
______________________________________________________________

dimanche 9 octobre 2011

Chroniques d'Yonsé #4


C'est ta première visite? Va plutôt au début...

http://baliejolicoeur.blogspot.com/2011/06/chroniques-du-square-11-la-genese.html

ou à l'épisode #1 de la saison 2...

http://baliejolicoeur.blogspot.com/2011/09/chroniques-dyonse-1.html


La nuit vint rapidement après que tous aient profité des festivités offertes par le Roi. Lui-même s’était montré bon vivant en absorbant, plus que de raisonnable, un breuvage de couleur rouge qui rendait joviaux et désinhibés ceux qui le buvait. Cette attirance pour ce type de boissons n’était qu’un point commun de plus avec notre Riri des canassons…

Ce fut une journée très instructive pour moi, de voir ainsi les habitants du royaume d’Yonsé. Leur sens de la fête et la solidarité dont ils faisaient preuve les uns envers les autres donnait l’image d’une communauté harmonieuse. Le Roi leur témoigna — dans un ton solennel au début, puis de manière plus spontanée et démonstrative, debout sur une table un godet à la main, titubant et chantant à tue-tête — combien il était fier d’être leur Roi et qu'il les aimait tous. 

René, quant à lui, resta somme toute mesuré, probablement du fait de ma présence, car nombreux étaient ceux qui venaient le taquiner sur le sérieux qu’il était ce jour-là. Je put en profiter pour lui faire part de ma joie d’être à ses côtés et combien je pensais à lui chaque jour. Alors que je lui disais cela, l’absence de Line durant toute cette journée devint flagrante. Un peu gênée de ne pas y avoir pensé avant, je demandai à René où est-ce qu’elle se trouvait. Il m’expliqua qu’elle était très souffrante depuis plusieurs jours au point de devoir rester allongée le plus clair de son temps et que son état de santé expliquait aussi en partie ma présence parmi eux.

-     Tu crois que je peux la soigner ? J'ai aucune connaissance en médecine, moi.

-     Tu n’en auras pas besoin, allons voir le mage maintenant, il va tout nous révéler.

Il fallut traverser tout le village à la nuit tombée, éclairés à l’aide d’une torche ardente que tenait René à bout de bras. Nous sortîmes du village par un sentier étroit qui s’enfonçait dans une forêt dense. Les ombres mouvantes des arbres aux branches tortueuses rajoutèrent de l’anxiété à ma nature déjà inquiète à la nuit tombante. Seule la présence de mon valeureux chevalier me permit d’avancer sans trop de crainte. Au détour du sentier, nous arrivâmes à la demeure du mage. Sa maison était incrustée à la base d’un gigantesque tronc d’un chêne. La porte et une petite fenêtre ornaient la façade qui s’ajustait à l’orifice que devaient laisser les immenses racines, avant que le creux ne soit aménagé dans cet original habitat. Les fins rideaux laissaient transparaître la lueur chancelante d’une bougie, signe que le mage nous attendait.

Une fois à l’intérieur, le mage me salua simplement et nous invita à nous assoir sur les tabourets disposés autour d’une massive table ronde. L’intérieur de cette étroite demeure était essentiellement voué à la cuisson et la confection de diverses potions. Les parois étaient aménagées en étagères sur lesquelles étaient disposés de nombreux ingrédients, dont certains me glaçaient les os rien qu’à leur vue. Des insectes monstrueux, des serpents, des batraciens, des fœtus d’animaux mal formés, baignaient dans des bocaux en verre poussiéreux à côté de divers ustensiles dont je ne pouvais deviner l’usage.

-     Balie, je tiens à vous remercier d’être venue parmi nous et à votre sens de l’abnégation face au danger auquel vous risquez d’être exposée, dit le mage, alors que mon regard était perdu sur une affiche fixée au mur qui représentait l’écorché d’un animal à deux têtes, sorte de mélange entre le corps d’un primate et des gueules de loup.

-     Danger ? Ah..., quel type de danger ?

-     René va vous expliquer la situation.

-     Euh, oui… À mon retour, la reine, sa fille et la sorcière du lac perché furent répudiés et envoyées aux confins de notre contrée. Cette peine clémente avait été prise pour que les deux autres filles du Roi ne souffrent pas d’une disparition définitive de leur mère et sœur, et qu’elles puissent aller les voir de temps à autre. Elles ne devaient jamais revenir sous peine d’être à jamais éloignées du royaume d’Yonsé. Depuis quelques semaines, de nombreux faits nous indiquent que l’ex-épouse du Roi n’a pas abandonné sa funeste entreprise. Avec la maléfique assistance de la sorcière, elle a extrait Mr Jackson de son monde imaginaire pour qu’il vienne à ses côtés et exploiter ses talents à ses propres fins. Il semble qu’il ait de nouveau perdu la mémoire et qu’il n’ait d’autre obsession que de battre la campagne à la périphérie de notre contrée. Grâce à son art du chant et du spectacle, il met le public sous son charme. Fragilisés, les spectateurs sont alors influencés par la reine qui les incite à la désobéissance et à la révolte pour évincer le Roi du trône à son profit.

-     Pauvre Mr Jackson ! Mais… vous pouvez pas arrêter ça ? Et moi, qu’est-ce que j’y peux ?

-     La force de son talent est immense, ajouta le mage, et ses exhibitions son accomplies dans des bourgs de manière imprévisible. Nous ne pouvons que constater les dégâts le lendemain lorsque les troupes royales tentent d’intervenir en se faisant lapider et invectiver. Comme le Roi ne souhaite pas agir par la force, les troupes ne peuvent que se retirer, laissant d’autant plus les villageois dans l’illusion de leur phantasme et de leur toute-puissance.

-     Dites-lui, mage, ce que vous avez perçu dans la boule des prophéties, demanda René.

Le mage se leva et prit une boite délicatement sculptée dans un bois rare. Il se rassit et la posa devant lui. Il l’ouvrit délicatement comme si ce qu’elle contenait était extrêmement précieux ou fragile. Il en retira un objet enveloppé dans un tissu brodé qu’il reposa sur la table après avoir repoussé le coffret. Je ne pus m’empêcher de lâcher bref éclat de rire lorsque je reconnus la babiole faisant office de boule des prophéties. Il s’agissait bel et bien d’une des boules identiques à celles que j’avais ramenées avec moi quelques mois plus tôt et qui contenait le modèle réduit de la grande montagne de fer dans de l’eau aux petits pétales blancs. Je mis ma main devant la bouche comme pour mieux retenir mon rire, alors qu’une fois de plus René me fit les gros yeux, un instant, avant que lui-même me lâche un sourire ponctué d’un clin d’œil. Le mage était déjà en train de se concentrer sur la boule pour tenter d’y percevoir probablement une scène à venir.

-     Par la volonté du fluctuat nec mergitur je devine la tragédie qui menace le royaume d’Yonsé, déclama le mage. L’homme enfant intronisera l’élue du don extrême de charisme à la prochaine nuit sans lune. Plus rien ni personne ne pourra, après cela, résister à son magnétique pouvoir de séduction. Si ce pouvoir était mis au bénéfice de l’ex-reine, notre royaume n’y résisterait pas.

Puis, se tournant vers moi il prit une voix rauque qui me frigorifia littéralement.    

-     Seule une âme saine dans un corps pur peut être sujette à ce pouvoir, tu dois te substituer à sa fille ainée pour empêcher que le royaume tombe sous son escarcelle.



mardi 4 octobre 2011

Chroniques d'Yonsé #3

C'est ta première visite? Va plutôt au début...

http://baliejolicoeur.blogspot.com/2011/06/chroniques-du-square-11-la-genese.html

ou à l'épisode #1 de la saison 2...

http://baliejolicoeur.blogspot.com/2011/09/chroniques-dyonse-1.html



René me retourna un regard incrédule, toute l’assistance se figea et le Roi lui-même s’immobilisa. Il me fixa un instant, un sourcil relevé trahissait sa surprise. Nos regards se croisèrent et tous ses traits du visage, sa corpulence, sa façon de se tenir debout venaient conforter mon sentiment d’être bien face à notre Henri, sous-maître de la guilde des canassons.

Un bruyant éclat de rire vint rompre ce silence pesant :

-      Ha, ha, ha ! « mon petit poussin » a-t-elle dit ! je reconnais bien là celle que tu m’as décrite, dit-il en se tournant vers René.

Toute l’assistance se mit à rire également, d’abord timidement puis de plus en plus fort en écho avec l’hilarité du Roi. Moi-même je ne pus retenir quelques spasmes de confusion, me rendant à l’évidence que le seigneur d’Yonsé n’était qu’un troublant sosie d’Henridk.

-      Mais qu’est-ce qui t’as donc pris d’interpeller ainsi notre Roi ? s’indigna à demi-voix René, profitant du brouhaha de l’assemblée.

Je répondis d’une mimique désolée en espérant qu’il comprenne que je ne voulais point heurter quiconque.

-      C’est qu’il ressemble comme deux gouttes d’eau à mon ami Riri ! je croyais que c’était lui.

D’un geste de la main, le Roi imposa le silence. Un serviteur, qui se tenait en second plan, s’avança alors et claqua deux fois dans ses mains. La cour qui nous avait escortés jusque-là s’en retourna en quelques instants vers la même porte par laquelle nous étions rentrés. Le Roi nous convia, René et moi, à nous asseoir sur un banc en granit massif à la droite du siège royal. Il s’installa de nouveau sur son trône et quand les lourdes portes résonnèrent puissamment à leur fermeture, nous n’étions plus que nous trois dans cette vaste et majestueuse salle. Le discret serviteur avait repris sa place, immobile dans le recoin sombre d’un pilier.

Avant que le silence complet ne revienne, René eut le temps de me suggérer de ne prendre la parole que lorsque le Roi m’y invitera.

-      Honorable Balie, avant toute chose je dois vous faire part de ma reconnaissance envers vous pour avoir rendu possible le retour de ma fille Line et de mon plus valeureux chevalier que je n’ai jamais eu, dit le Roi en se tournant vers René visiblement gêné de ce compliment.

Puis il poursuivit :

-      Il m’a été très pénible d’imaginer l’enfer qu’ils ont vécu dans cet autre monde sans loi ni honneur. Moi-même j’ai longtemps souffert de ma naïveté de n’avoir point vu quels étaient les desseins tortueux de mon ex-épouse et de sa fille que j’ai toutes deux répudiée. Le retour de Line et René dans le royaume a de nouveau illuminé ma vie et celle de mes sujets. Chacun vit et travaille avec enthousiasme pour que notre communauté se développe et s’épanouisse par-delà les montagnes et les vallées qui nous entourent. Tous ont su comment une courageuse jeune femme est venue en aide à la princesse pour qu’elle retrouve sa liberté et sa dignité. Je vous dois ce que j’ai de plus cher : la vie de ma fille.

Un bruyant claquement de porte vint rompre le silence solennel qui suivit cette dernière phrase. Un autre serviteur s’avança vers le Roi et lui chuchota quelques mots inaudibles à son oreille.

-      Déjà ? s’exclama le Roi agréablement surpris, euh…bien, venez avec moi vous deux, nous allons faire quelque chose qui me tient à cœur.

D’un pas rapide, nous suivîmes le Roi et son serviteur. Nous passâmes par des portes dérobées, suivîmes des couloirs étroits sur de longues distances, descendîmes des escaliers escarpés pour finalement aboutir dans la cour fortifiée où nous attendait le carrosse royal attelé à quatre magnifiques pur-sang. À peine assis, l’attelage s’ébranla, passa le pont-levis et traversa le village à une vitesse à peine imaginable dans de telles ruelles étroites. Quelques instants plus tard, nous arrivâmes en périphérie du village où attendait un public dense venu, selon toute vraisemblance, à une sorte d’inauguration d’un équipement destiné à la population.

-      C’est fabuleux ! s’exclama le Roi à peine descendu de son carrosse, encore mieux que sur les plans !

En descendant à mon tour je découvris une grande plate-bande d’herbe rase semblable à de la pelouse. Des gradins étaient disposés de part et d’autre. Ils pouvaient accueillir quelques milliers de spectateurs. Le terrain était délimité à ses deux extrémités par deux longs poteaux verticaux reliés entre eux par une barre horizontale.

-      Oh ! mais c’est un terrain de rugby, m’exclamais-je en découvrant l’installation.

-      Un stade de Soule d’Yonsé ! rectifia le Roi, c’est moi qui ai adapté les règles de la traditionnelle Soule pour la rendre plus spectaculaire et jouable par tous mes sujets. J’ai aussi instauré un jour sans travail pour que chacun puisse s’entrainer et participer au championnat du royaume.

« Et en plus il est amateur de rugby comme Riri », pensai-je ; cela fait beaucoup de coïncidences…

Le Roi monta sur la tribune d’honneur où il nous convia René et moi. Il fit un discours passionné sur les valeurs de la pratique de cette discipline, sur la solidarité, l’honneur, les vertus de l’effort et de l’esprit d’équipe qui devaient être, selon lui, les mêmes valeurs qu’il voulait voir appliquer dans son royaume entre tous ses sujets, tous les jours de l’année. Il ajouta qu’adopter tous ces principes restait une chose fragile face à la menace à laquelle ils devaient faire face aujourd’hui. Puis il conclut en évoquant ma présence :

-      Depuis ce matin mademoiselle Balie est parmi nous, vous savez tous ce que nous lui devons et je vous demande de faire honneur à sa présence. Elle représente aujourd’hui notre ultime espoir pour contrer les diaboliques stratégies de qui vous savez. C’est pourquoi ce stade portera son nom pour que chacun se souvienne de ce qu’elle a fait et va faire pour notre royaume. Longue vie à Balie !

-      Vive Balie ! scanda à mainte reprise le public en criant et sifflant.

L’émotion me monta à la gorge, mon duvet se hérissa sur ma peau et m’attendant si peu à tout ça, je ne pus que faire un timide geste de salutation au public qui était venu à la cérémonie. La matinée s’acheva par un banquet opulent pour les convives, moi, je me suffis d’un des flacons de Nepenthe que j’avais emmené dans mon sac. Quand l’effervescence retomba un peu plus tard dans l’après-midi, j’interrogeai René :

-      Et comment je vais pouvoir t’aider ici ? Je connais rien à ce monde !

-      Je n’en sais pas plus que toi. Seul le mage du Roi te dira ce que tu devras faire. Nous irons le voir à la nuit tombée.



samedi 1 octobre 2011

Chroniques d'Yonsé #2

C'est ta première visite? Va plutôt au début...

http://baliejolicoeur.blogspot.com/2011/06/chroniques-du-square-11-la-genese.html

ou à l'épisode #1 de la saison 2...

http://baliejolicoeur.blogspot.com/2011/09/chroniques-dyonse-1.html

________________________________

-     Balie ?… tu m’entends ?… Réveille-toi…

-     Hein ?... Je suis où ?... Qu'est-ce qui…

-     C’est moi, c’est René, tu peux te lever maintenant.

-     René ? Oui, ça y est ! ça a marché ?… ouiiii !

Je ne pus réprimer mon élan de me jeter dans ses bras alors que je n’étais encore qu’assise et lui accroupis à mes côtés. Il chancela de sorte qu’il dut se rattraper en posant un genou à terre et se retenir d’une main sur le muret. La douleur au crâne et le brouillard dans mon esprit se dissipèrent aussitôt par l’effet de la joie de revoir mon ami René. Je retrouvais son odeur et la sensation de son solide torse, aussi intactes que la nuit où nous nous étions séparés. Je restais ainsi quelques instants les yeux fermés pour profiter au mieux de cet instant inespéré. Après quoi, je découvris que nous étions au pied d’un puits de grande envergure qui ornait la place d’un village. Le sol en terre battue et les maisons alentours en toit de chaume et aux murs d’argile venaient confirmer, s’il en était besoin, que j’étais bien parvenue jusqu’à l’époque moyenâgeuse du Royaume d’Yonsé.

Un comité d’accueil avait été convié pour m’accueillir. Je devinais aux habits que portaient la dizaine de personnes présentes qu’elles avaient fait un effort particulier pour bien présenter. Des habitants curieux, dans leurs vêtements de tous les jours, venaient grossir l’attroupement provoqué par mon arrivée. Bien que j’ai pris soin cette fois-ci d’avoir une tenue adaptée à divers types de climats et d’activités, je ne pouvais que surprendre avec mon ensemble « old british school » composé d’un pantalon, d’un veston sur un chemisier blanc et d’une casquette, le tout dans un tissu à carreaux dans les tons bruns. Des chaussures montantes à hauteur de chevilles devaient me permettre de marcher sur tout type de sol quel que soit le temps.

J’entendais, sans savoir de qui cela provenait vraiment, des chuchotis dans le public :

-     Qu’est-ce qui s’est passé ?

-     C’est elle, tu crois ?

-     Elle vient juste d’arriver, elle est apparue d'on ne sait où…

René se releva promptement et demanda à la petite foule qui s’était maintenant formée de reculer et que chacun retourne à ses occupations. Cela n’eut pas beaucoup d’effet.

Je glissais le talisman, que je n’avais pas quitté des mains, dans mon sac en bandoulière et prit la main que me tendait René pour que je me relève. Nous quittâmes la place escortés par les membres du comité d’accueil. La température était clémente et le ciel d’un bleu pur laissait éclater un soleil encore tiède. J’en déduis qu’il était le milieu de la matinée et le chant des oiseaux me fit penser à ceux de nos plus verdoyants parcours. Je réalisais encore avec peine ce qui venait de se produire : comment expliquer que je puisse me retrouver à une lointaine époque dans une étrange contrée alors que quelques instants auparavant ma vie se résumait à lancer inexorablement des balles vers un trou invisible ?

René m’expliqua que nous allions rencontrer le Roi Henri d’Yonsé qui tenait à ce que je lui sois présentée dès mon arrivée. La traversée du village me permit d’observer l’activité grouillante de ses rues et ruelles où chacun semblait avoir un rôle bien précis. De nombreux habitants proposaient des aliments ou des biens à la vente, d’autres transportaient, à l’aide de chevaux et de charrettes, des matériaux divers. Les enfants quant à eux faisaient ce que bon leur semblaient et venaient vers moi pour me regarder de près, tentaient de me toucher,  me demandaient qui j’étais, comment je m’appelais…

Nous arrivâmes vers la bâtisse principale au milieu du village. C’était une forteresse telle que me l’avait décrite René quelques mois plus tôt. Construite sur une bute, elle dominait la vaste plaine qui s’étendait bien au-delà du village. Une herse et un pont-levis étaient le seul accès et la seule issue à la demeure du Roi et des membres de la cour. Une vaste place centrale permettait d’y recevoir les habitants du village et de la proche contrée lors d’éventuelles attaques d’ennemis.

Les hautes murailles crénelées semblaient inviolables et devaient en dissuader bon nombre avant qu’ils ne se risquent à devenir la cible d’archers disposés à chacune des nombreuses meurtrières.

Nous empruntâmes les marches de la tour principale afin d’accéder aux appartements privés du Roi.

Devant une grande porte en bois finement sculpté, deux gardes en uniforme d’apparat se tenaient de part et d’autre. Chacun d’eux tenait une lance de telle sorte qu’elles se croisaient, laissant aisément deviner qu’il n’était pas permis d’accéder à la pièce suivante. Nous patientâmes un instant, René et moi au premier rang. Les membres de la cour qui nous avaient accompagnés jusqu'ici se mirent eux aussi en rang derrière nous dans un ordonnancement qui semblait répondre à des critères bien précis qui m’étaient difficile de deviner.

-     Le Roi va nous recevoir, ne soit pas inquiète, il tient au protocole, mais il est juste et sait écouter, me chuchota René.

-     J’suis pas inquiète, j’ai l’habitude de discuter régulièrement avec mon maitre de guilde, il sait être cool aussi Kiki.

Un bruit de verrou se fit entendre et les battants de la porte s’ouvrirent très lentement du fait de l’inertie de leur poids. Sans sourciller, les gardes écartèrent leur lance, signe que la voie était dégagée. René me prit sous son bras et nous avançâmes d’un pas lent et solennel. La vaste pièce était ornée d’immenses tableaux représentant des scènes de batailles dans lesquelles les généraux étaient mis en valeur. Un imposant vitrail par lequel pénétrait le soleil surplombait l’estrade du fond sur laquelle était disposé le trône que je devinais à peine du fait du contre-jour aveuglant. Lorsque nous arrivâmes à une certaine distance du trône, René nous stoppa net, mit un genou à terre et fixa son regard au sol. De son bras encore sous le mien il me tira vers le bas en me faisant comprendre d’agir comme lui. Avec un temps de retard je mis aussi genou à terre et baissait la tête, mais je ne pus m’empêcher de regarder en direction du trône. Tous les membres de la procession s’étaient eux aussi prosternés quand le Roi se décidât à se lever en signe de bon accueil. N’étant plus à contre-jour, je pus ainsi découvrir en détail son visage qui m’était en fait bien familier.

-     Riri !? Mais qu’est-ce que tu fais là mon ptit poussin ? m’écriais-je dans cette vaste pièce aux mille échos.

-     C’est Henri ! dis-je, en me retournant vers René.